Lois et règlements

L’échange de consentement verbal équivaut à un règlement

Me Maude Scallen
Écrit par Me Maude Scallen

Un vieil adage juridique dit : « Un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès ».

À la suite de la contestation d’une décision de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) devant le Tribunal administratif du travail (ci-après TAT), une convocation sera transmise aux parties, en l’occurrence le travailleur ou la travailleuse et l’employeur, afin que chacun.e puisse exposer leurs prétentions devant le juge.

L’article 21 de la Loi instituant le Tribunal administratif du travail énonce :

« Si les parties à une affaire y consentent, le président du Tribunal, ou encore un membre du Tribunal ou un membre du personnel désigné par le président, peut charger un conciliateur de les rencontrer et de tenter d’en arriver à un accord. »

Pour les années 2021-2022, le TAT a ouvert plus de 43 179 dossiers. Sur ce volume, plus de 18 148 dossiers ont fait l’objet d’une conciliation entre les parties. Ces chiffres démontrent l’importance capitale du service de conciliation au sein de cette institution.

Souvent, après consultation d’un.e avocat.e ou d’un.e conseiller.ère juridique, les parties décident de régler à l’amiable. Au terme de négociations entre les parties, il y a alors un échange de consentement.

Ainsi, le conciliateur ou la conciliatrice attitré.e au dossier constate une entente verbale après validation auprès de chacune des parties. En raison du nombre de dossiers et des délais inhérents, les documents de conciliation sont mis à la disposition des parties dans les semaines, voire les mois suivants par le Tribunal. L’audience qui était prévue est aussitôt annulée et la signature de l’entente n’est qu’une question de formalité.

Malheureusement, il arrive qu’une des parties change d’idée. Quels sont les recours de l’autre partie?

Advenant une telle éventualité, il sera nécessaire de demander au Tribunal d’entériner l’accord intervenu entre les parties, d’autant plus lorsque cet accord vous avantage. 

Il s’agit essentiellement de soulever un moyen préliminaire au Tribunal. Le débat est donc circonscrit à la question suivante : un accord est-il oui ou non intervenu entre les parties?

D’ailleurs, à moins d’une preuve contraire, la jurisprudence nous enseigne que le fait qu’un.e conciliateur.trice du Tribunal annule une audience présuppose qu’il ou elle a préalablement obtenu le consentement de toutes les parties.

Pour avoir gain de cause, la partie qui invoque l’existence d’un accord devra démontrer les éléments suivants :

  1. Il y a eu échange de volonté de la part de chacune des parties impliquées;
  2. L’accord intervenu est conforme à la Loi.

Pour être conforme à la Loi, un accord doit présenter les caractéristiques suivantes :

  • Il ne déborde pas le cadre de l’objet en litige;
  • Ses conclusions ne sont pas contraires à l’ordre public;
  • Il respecte la législation et la réglementation applicables;
  • Il n’est pas fondé sur des faits manifestement faux, inexacts ou qui ne sauraient supporter les conclusions recherchées.

Dans l’affaire Les Restaurants Michel Deschênes inc. et Catherine Soucy[1], le Tribunal va accueillir favorablement la demande à l’employeur et entériner l’accord. En ce sens, le Tribunal conclut que le fait que la travailleuse ait tout simplement changé d’idée après avoir consenti verbalement aux termes de l’entente intervenue ne constitue pas un motif justifiant de ne pas entériner l’accord.

Malheureusement, nous constatons une augmentation de ce type de requête, d’où l’importance de bien documenter son dossier et la trame factuelle entourant la conclusion de vos ententes.


[1] 2022 QCTAT 3374.

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