Architecture et urbanisme Technique

Performance de l’enveloppe en service: le projet Auvergne laboratoire vivant

Richard Trempe
Écrit par Richard Trempe

La période actuelle, marquée par le changement climatique, l’environnement et la transition énergétique, amène le domaine de la construction à se redéfinir, en quête d’une nouvelle pratique du bâtiment intégrant performance, durabilité et bien-être.

C’est dans cette perspective qu’un lieu d’expérimentation a émergé dans la région de Portneuf. Étendu sur un site de 130 hectares permettant la construction de plusieurs pavillons, Auvergne laboratoire vivant vise à participer à l’avancement et au rayonnement des connaissances dans l’industrie. Le projet se donne comme mission de bâtir plusieurs assemblages permettant de :

  • Documenter sur le terrain la performance en service de systèmes, dans des lieux monitorés et habités.
  • Favoriser la multidisciplinarité en impliquant dans le projet de construction et de recherche concepteurs, fabricants et entrepreneurs.
  • Développer des outils de communication pour assurer la diffusion et le partage de l’information avec les acteurs de l’industrie.

Auvergne laboratoire vivant repose sur des hypothèses développées à partir de détails d’enveloppes haute performance. La modélisation et des simulations informatiques en ont dicté la conception, au moyen de logiciels permettant d’anticiper les désordres sur une projection de dix ans.

Le projet compte de nombreux partenaires, dont la Société d’habitation du Québec, UL Science du bâtiment, Groupe LGT, la firme rd2, le Cégep du Vieux-Montréal et Soprema.

Premières expérimentations de la recherche

La construction d’un premier pavillon a été réalisée l’an dernier par l’entreprise Carsim. Le mur SITE (système isolé totalement par l’extérieur), aussi connu sous l’appellation « perfect wall », a été privilégié. Fréquemment utilisé dans la construction institutionnelle, il est encore peu connu dans le domaine résidentiel. Les critères suivants ont dicté l’emploi du SITE pour cette première phase :

  • Les plans d’étanchéité sont situés du côté intérieur de l’isolation, le point de rosée se loge donc du côté extérieur.
  • Les plans d’étanchéité ne sont pas soumis aux conditions froides et humides, et les risques de condensation et de rétention d’humidité sont minimisés.
  • Aucun matériau putrescible ne se trouve trappé entre deux plans d’étanchéité.
  • Le potentiel d’assèchement est optimal, contrairement aux façons de faire actuelles.
  • Toute la charpente est conservée au chaud, éliminant la majorité des ponts thermiques.
  • Les opérations de pose des plans d’étanchéité sont simplifiées par la combinaison des plans pare-eau/air/vapeur.
  • L’espace entre les montants est laissé libre pour le passage de la mécanique et de l’électricité. Il permet aussi d’uniformiser la température des parois internes et d’améliorer le confort.

L’enveloppe repose aussi sur une stratégie bioclimatique visant, entre autres, l’optimisation par l’ensoleillement, les vents dominants, la topographie, la végétation et la protection des surfaces exposées aux intempéries.

Le suivi post-construction

Le suivi de performance post-construction dans l’industrie résidentielle est actuellement très limité, voire inexistant. La démarche d’Auvergne laboratoire vivant cherche à pallier cette carence et à développer une approche de vérification in situ.

Le pavillon a ainsi fait l’objet de divers suivis, dont un monitorage en continu au moyen d’enregistreurs de données intégrés dans l’enveloppe et d’enquêtes sur le confort et l’usage des lieux. L’étude a aussi été bonifiée par des essais en infiltrométrie, thermographie et efficacité énergétique. L’ensemble a notamment permis de mesurer :

  • Un taux de fuite d’air bas (0,65 CAH), mais comprenant néanmoins des zones vulnérables ciblées.
  •  L’uniformité de la transmission de chaleur et la bonne performance des bris thermiques.
  • La performance de bris thermiques variés mis en place à des fins comparatives.
  • Le risque de condensation dans le mur, qui est pratiquement nul dépassé le plan d’étanchéité à l’eau et à l’air.
  • Le potentiel d’assèchement optimisé par l’ordonnancement et les propriétés des matériaux intégrés.
  • Un risque de contamination fongique inexistant au-delà de la cavité murale extérieure.

De l’avant-projet jusqu’à la mise en service, des études de coûts ont aussi été effectuées et ont permis d’évaluer que le coût de construction d’une enveloppe telle que réalisée, comparativement aux approches conventionnelles, peut représenter une augmentation de l’ordre de 27 % si l’on tient compte uniquement du coût d’enveloppe, et de 7 % lorsque rapporté au coût global de l’ensemble, alors que la consommation serait réduite de 20 %.

L’étude discute aussi de la maximisation de l’isolation, en tenant compte des coûts de l’énergie.

La construction projetée de deux autres pavillons, prévue au printemps 2021 et actuellement en processus de design, permettra de raffiner les informations obtenues et de développer ou d’améliorer ce qui a été fait pour le premier pavillon. Elle permettra aussi surtout de partager l’expérience avec les professionnels de l’industrie.

La mission d’Auvergne laboratoire vivant est avant tout pédagogique, au service de l’avancement de la science du bâtiment. Des ateliers et visites guidées sont prévus au cours de 2020. Au-delà des activités offertes, toute personne intéressée par cette approche est invitée à venir en discuter. Pour en savoir davantage, visitez le trempearchitecte.com.

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Richard Trempe

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