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Comment ne plus pénaliser la nouvelle offre d’habitations neuves abordables?

Paul Cardinal
Écrit par Paul Cardinal

Dans un contexte où il manque d’habitations, ce qui en retour crée des pressions haussières sur le prix de l’ensemble des propriétés, augmenter l’offre est la seule manière de maintenir une certaine abordabilité. Il faut dans ce cas encourager la construction de nouveaux logements et les rénovations majeures qui permettent d’ajouter de nouvelles unités d’habitations par la reconversion d’espaces autrefois dédiés à un autre usage.

Or, sans même discuter ici des coûts de construction, d’emblée, le fait que les habitations neuves soient taxées creuse artificiellement l’écart entre le prix du neuf et de l’existant. C’est précisément pour ne pas pénaliser indûment l’industrie de la construction et les acheteurs de maisons neuves[1] que le gouvernement a instauré un remboursement partiel de la TPS.  

Le remboursement de TPS pour les habitations neuves a aussi été mis en place pour des raisons sociales et d’équité fiscale. Le remboursement visait à reconnaître l’importance de la propriété d’une résidence et le fait qu’un tel achat représente l’investissement le plus important qu’un ménage puisse faire dans sa vie. Du même coup, le gouvernement  fédéral respectait ainsi son engagement de ne pas nuire à l’abordabilité de l’habitation au Canada. Les mêmes principes ont été appliqués au Québec lorsque le gouvernement du Québec a prévu le remboursement d’une portion de la TVQ.

Tant au fédéral qu’au provincial, le remboursement d’une partie des taxes cible les propriétés résidentielles accessibles pour une grande partie des ménages, tandis qu’aucun remboursement n’est octroyé pour des propriétés « luxueuses ». Les deux mesures comportent alors des prix plafonds au-delà desquels aucun remboursement n’est accordé.       

À l’occasion du budget de 2010-2011, le gouvernement a révisé la fourchette de prix donnant droit au remboursement de TVQ pour une habitation neuve, la situant entre 200 000 $ et 300 000 $, tout en haussant le taux de remboursement maximum à 50 %. Depuis, avec la hausse soutenue du prix des propriétés[2], cette fourchette n’est plus du tout adaptée à la réalité du marché immobilier, en particulier à Montréal. Le Tableau 4 montre clairement qu’entre 2010 et 2018, le nombre de demandes de remboursement de la TVQ a considérablement diminué, la raison étant bien sûr que de moins en moins d’habitations neuves se qualifient en raison du prix plafond trop bas de 300 000 $. Le même tableau permet aussi de constater que le remboursement moyen diminue lui aussi depuis quelques années, puisque celui-ci est moindre au fur et à mesure que le prix augmente à l’intérieur de la fourchette de 200 000 $ à 300 000 $.         

L’APCHQ invite le gouvernement à indexer les prix servant aux calculs du remboursement de TVQ si l’on souhaite que cette mesure fiscale demeure pertinente et respecte les principes qui ont mené à son instauration, c’est-à-dire de préserver l’abordabilité des habitations neuves.


Dans le cadre des consultations prébudgétaires 2021-2022, l’APCHQ recommande de bonifier le remboursement de la TVQ pour habitations neuves en l’harmonisant complètement avec le calcul du remboursement de TPS.

Pour que les prix servant aux calculs du remboursement de TVQ soient un meilleur reflet du marché actuel, et afin de simplifier l’administration de la mesure, nous préconisons que, à l’instar du remboursement de la TPS, le crédit soit maximal pour une juste valeur marchande (JVM)[3] allant jusqu’à 350 000 $ et que le taux de crédit soit ramené à 36 %. Le remboursement maximal de la TVQ serait donc de 12 568,50 $. Toujours selon les mêmes modalités que pour la TPS, le remboursement diminuerait ensuite progressivement lorsque la JVM est supérieure à 350 000 $ et deviendrait nul pour une JVM de 450 000 $.

Il va de soi que notre proposition implique, dans l’optique d’une harmonisation complète avec la mesure fédérale, que les modalités de remboursement de la TVQ pour habitation neuve soient à l’avenir modifiées en concomitance avec d’éventuels changements aux modalités de remboursement de la TPS.  

Un remboursement de la TVQ à un taux moindre est actuellement disponible lors de la construction de logements locatifs (36 % pour un logement dont le prix est inférieur à 200 000 $, avec remise partielle jusqu’à 225 000 $) alors que, pour un même logement acquis par un propriétaire-occupant, le remboursement peut atteindre 50 % (avec remboursement partiel jusqu’à un prix d’achat de 300 000 $).

Afin de faciliter l’administration de cette mesure et tout en favorisant l’abordabilité des loyers des logements locatifs, nous préconisons encore ici une harmonisation complète avec le crédit fédéral sur la TPS. 

L’APCHQ recommande d’harmoniser complètement les modalités de remboursement de la TVQ pour les habitations locatives neuves avec celles pour la TPS.

De cette façon, le crédit de la TVQ pour habitations locatives neuves demeurerait à 36 %, mais la JVM donnant droit au remboursement maximal passerait elle aussi à 350 000 $, pour un remboursement maximal de 12 568,50 $. Le remboursement diminuerait ensuite progressivement lorsque la JVM est supérieure à 350 000 $ et deviendrait nul pour une JVM de 450 000 $.

[1] Un aperçu de certaines dispositions de la taxe sur les produits et services en matière immobilière, André Lareau, Les cahiers de droit, 1991.

[2] Selon les données de la SCHL, au Québec, le prix moyen des propriétés individuelles et des copropriétés neuves écoulées dans les centres urbains comptant au moins 50 000 habitants était de 489 109 $ en 2019, une augmentation de 58 % depuis 2010 (309 201 $).

[3] Terrain et habitation combinés.

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