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Pourquoi le Québec ne doit pas imiter l’Ontario en matière de redevances de développement

Paul Cardinal
Écrit par Paul Cardinal

Dans un article paru dans Options Politiques, Mario Polèse, professeur émérite à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS)-Urbanisation, explique les raisons pour lesquelles les logements sont plus abordables au Québec que dans les autres provinces canadiennes, en particulier l’Ontario.

L’auteur a comparé, à partir des données du Recensement de 2021, l’abordabilité des logements dans plusieurs régions urbaines au Canada. Il s’est ensuite attardé aux comparaisons de villes ayant des caractéristiques socio-économiques similaires en Ontario et au Québec[1].       

Inabordabilité des logements : les redevances de développement montrées du doigt

L’auteur identifie rapidement le principal coupable de l’inabordabilité des logements dans la province voisine, soit l’ampleur des redevances de développement.

Depuis plus de trois décennies, le modèle ontarien de planification urbaine permet aux municipalités d’exiger des promoteurs immobiliers des frais de développement pour tout projet de construction de nouveaux logements. Ces redevances, dites de développement, servent à financer l’accroissement des infrastructures (routes, trottoirs, égouts, etc.), mais aussi des services à la communauté tels que la police, les services incendies, le transport en commun, les bibliothèques, etc. Et, malheureusement, l’établissement des montants des redevances semble comporter une trop grande part d’arbitraire. 

L’idée que les nouveaux développements se paient d’eux-mêmes, génèrent de nouveaux revenus pour les municipalités et diminuent ainsi les pressions sur la taxe foncière générale semblait alléchante. Mais l’expérience a montré qu’il y a eu des effets pervers sur l’offre de logements et sur l’abordabilité.

Pour s’en convaincre, prenons l’exemple de la ville de Toronto, où les charges de développement en tout genre s’élèvent désormais à quelque 80 000 $ par porte en moyenne pour un appartement de deux chambres. Sans surprise, ces coûts sont refilés aux consommateurs, ce qui se traduit par des prix et des loyers plus élevés pour les logements neufs, mais ultimement pour les logements existants aussi. 

Le Québec a ouvert la boîte de pandore en 2017           

Dans le modèle Québécois, dans le passé, les nouvelles infrastructures et les services à la communauté induites par les nouveaux développements étaient principalement financés par les taxes foncières générales. Mais depuis 2017, la loi 122 permet désormais aux municipalités québécoises d’imposer des redevances de développement, et de plus en plus de municipalité se prévalent de ce droit. Quoique les montants chargés aux développeurs demeurent jusqu’à maintenant modestes, M. Polèse met en garde le Québec à l’effet qu’il s’agit là d’une tangente dangereuse et qu’il n’est pas trop tard pour faire marche arrière.             

L’APCHQ, qui s’est déjà prononcée sur les effets pernicieux des redevances de développement, endosse entièrement les conclusions de M. Polèse. Nous avons d’ailleurs eu la chance de commenter le tout dans un article récent d’André Dubuc de La Presse sur le sujet.


[1] Notamment, il fait ressortir, que, pour les logements locatifs, les loyers moyens sont de 981 $ à Montréal comparativement à 1 618 $ à Toronto; et que pour les maisons, le prix moyen est de 500 400 $ à Montréal comparativement à 1 112 000 $ à Toronto. Ces écarts ne peuvent s’expliquer par des différences de revenu, le revenu médian des montréalais n’étant désormais pas beaucoup plus faible que celui des Torontois. L’explication se situe donc ailleurs.

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